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Jeux Asiatiques jour 6 : Les monopolistes complètent leurs empires

Jeux Asiatiques 2018

Ancien nageur, Eric Lahmy est journaliste, écrivain, rédacteur en chef, et reporter. Il anime depuis 2013 Galaxie-Natation, un blog dédié à son sport préféré.

Vendredi 24 Août 2018

SUN Yang a bel et bien complété le tableau, en remportant le 1500 mètres nage libre. Il détient les quatre courses des Jeux asiatiques 2018 qui viennent de s’achever à Djakarta, en Indonésie, du 200 au 1500 mètres. Pour achever son triomphe, il lui a fallu se débarrasser du Vietnamien NGUYEN Huy Hoang, une jeunesse de 18 ans et un mois (né le 10 juillet 2000) qui s’entraîne à raison de 20 kilomètres quotidiens au centre national des sports vietnamien de Can Tho (célèbre pour ses marchés flottants) et qui entend faire du dégât à l’avenir.

NGUYEN n’est pas un géant et il n’est pas épais, et ses 56kg pour 1,78m ne font pas le poids face aux 89kg pour 1,98m de SUN, mais il a porté la contradiction, prenant la tête aux 750 mètres atteints en 7’33s66 et attaquant avec conviction. SUN, qui le tenait de près, parfois devant parfois derrière, parvint à se dégager à deux cents mètres du but.

On connait ses qualités de finisseur !

On ne peut pas se rendre compte de chez nous de l’importance que pouvaient revêtir pour SUN ses résultats aux Jeux asiatiques. Pratiquement aucune information ne filtre entre l’est et l’ouest, voire même entre l’équipe et les média chinois.

Mais il suffisait de voir comment SUN se comportait après sa première victoire, en début de semaine à Djakarta, sur 200 mètres, l’émotion qu’il dégageait en allant visiter dans les tribunes un groupe, sans doute d’entraîneurs et de dirigeants, peut-être de journalistes chinois, voir les quelques pleurs qu’il versait, pour comprendre qu’il y avait beaucoup de sentiments en jeu.

Que s’était-il passé ? Quelle avait été la cause de tous ces sentiments ? Avait-il douté, ou été mis en doute, avait-il craint de ne pas être à la hauteur, ou quoi d’autre ?

Les nageurs ne sont pas des machines, et l’anecdote me le démontrait. Venant de SUN, loin d’être le nageur le mieux apprécié, elle n’en prenait que plus de forces…

NATATION SPORT DE CONTACT

En parlant d’émotions, une algarade a fait les choux gras de la presse spécialisée, une KIM coréenne, 5e du 100 dos, a été « agressée » par une nageuse chinoise qu’elle avait accidentellement touchée au visage. Il parait qu’elle s’est excusée mais en coréen, que la Chinoise a cru qu’elle l’insultait et lui a vulgairement parlant mis sur la gueule. Les Chinois ont le sang chaud, il me souvient que SUN, encore lui, avait comme ça châtié une nageuse brésilienne aux Jeux olympiques. Je vous passe la suite de cette histoire d’extrême horion, qui s’est terminée par de courtoises visites de délégations nationales avec excuses, courbettes et autres déclarations d’éternelle amitié entre les peuples…

YASUHIRO KOSEKI GAGNE LE 50 APRES LE 100 ET LE 200 BRASSE : QUI PEUT LE PLUS PEUT LE MOINS

Revenons à la compétition. Yasuhiro KOSEKI enlevait le 50 brasse, victoire ajoutée à celles obtenues sur 100 et 200. Pour rares qu’ils soient, ces triplés démontrent combien le programme de la FINA est une aberration, un non sens dont le seul but est de pourvoir autant ou plus de médailles que l’athlétisme. Les dirigeants internationaux arguent qu’ils offrent ainsi à d’autres nageurs et à d’autres programmes l’occasion de se distinguer, mais c’est une illusion à combattre. KOSEKI a fait le triplé que BALANDIN avait réussi quatre ans plus tôt, et plus on ajoute d’épreuves au programme, plus ce sont les mêmes qui l’emportent…

Ce qui précède est vrai pour SUN, vainqueur sur 200, 400, 800 et 1500 mètres, pour KOSEKI, vainqueur sur 50, 100 et 200 brasse, c’est vrai aussi pour Rikako IKEE, la Japonaise qui a raflé avec le 50 nage libre sa huitième médaille des Jeux, sa sixième d’or et sa quatrième victoire individuelle, avec le 100 crawl, les 50 et 100 papillon – qui aurait pu être sa cinquième si elle s’était présentée au départ du 200 libre…

C’est vrai aussi pour WANG Jianjiahe, qui a gagné le 400 après le 800 et le 1500 mètres, et qui aurait gagné le 900 mètres et le 1150 mètres s’il prenait la fantaisie à la FINA d’instaurer de telles courses, et le 500 mètres aussi quand j’y pense.

Sur 400, WANG n’a pas laissé la moindre chance à LI Bingjie, laquelle n’est techniquement plus à la hauteur de ses prestations 2017. La gamine de seize ans et de haute taille, 1,82m, s’en est allée vers un succès facile, qui a achevé sa course sans être inquiétée par une longueur de bassin exécutée en 29s38. Avec 4’3s18, elle frôle son record de la saison, 4’3s14 au meeting d’Atlanta, et reste en-dessous du record d’Asie, 4’1s75 par… LI Bingjie.

En revanche, Yui OHASHI a été séparée du monopole des quatre nages par une défaite sur 200 quatre nages face à une miniature Coréenne de 1,63m pour 52kg. Seoyeong KIM, à 24 ans, n’est pas une révélation, elle nage depuis dix-neuf ans et a connu des hauts et des bas, comme une blessure à l’épaule qui a entravé sa carrière, en 2011…

OHASHI, après sa victoire sur 400 quatre nages, avait montré quelques déficiences sur 200 mètres nage libre, d’abord dans le relais japonais – mais avec l’excuse qu’il se jouait juste après son 4 nages – puis dans l’épreuve individuelle, où elle ne pouvait pas reproduire à deux-trois secondes près ses temps d’avril dernier, quand elle terminait 2e du championnat national.

Ici, elle n’a pas mal nagé, mais elle n’a jamais pu s’imposer, malmenée de bout en bout. Et une remontée en brasse – en une seconde plus vite que KIM – ne suffisait pas à renverser la tendance.

VERS LA GESTION DES MICRO-DETAILS QUI FONT GAGNER…

Parce qu’ils s’étaient magnifiquement conduits aux PanPacifics, les relayeurs japonais du quatre fois 100 quatre nages étaient très attendus à Djakarta. Ils ont été battus, encore une fois d’une poignée de centièmes, par des Chinois aussi décidés qu’eux. Il est remarquable de noter combien le succès est séparé, désormais, dans la natation actuelle, par une différence anecdotique. Je dirais presque que le vainqueur devient de moins en moins souvent le plus fort, mais celui qui s’est « réveillé du pied droit » le matin de la course.

XU est actuellement plus fort qu’IRIE sur 100 dos, mais dans le relais, celui-ci le précède. D’un rien, mais le précède. En brasse, en revanche, il n’y a pas photo, et KOSEKI domine YAN, quoique de pas grand’ chose, quatre dixièmes. Après cela, KOBORI, le papillonneur japonais, lâche un peu plus de centièmes de secondes en face de son homologue chinois LI. Pour finir, les Nippons comptent sur Shinri SHIOURA, qui a gagné le 100 mètres individuel, et part avec 4/100e d’avance sur YU, qu’il avait laissé derrière lui en finale du 100 mètres. Mais là, c’est YU qui touche devant. Trois centièmes…

Alors ? Alors, c’est désormais sur des détails guère plus importants qu’on comptera de plus en plus pour faire la différence. Le temps des grandes conquêtes chronométriques est probablement achevé – même si nul ne peut prédire l’irruption dans le paysage d’une autre Katie LEDECKY. Sauf changement de « paradigme » au niveau de l’entraînement (la dernière livraison du blog Swimming science évoque « le futur de l’entraînement du nageur » et suggère l’aube d’une révolution technologique qui rationnaliserait, formaliserait et objectiverait la technique du nageur), sauf changement de cet ordre, c’est vers « l’infiniment petit » qu’il faudra se tourner pour gagner. Il y a vingt ans, Claude FAUQUET avait expérimenté la micro-nutrition (et l’avait abandonnée, parce qu’elle coûtait trop cher) ; devra-t-on explorer la micro-gestion des détails qui font gagner ?

Cela a peut-être déjà été fait. Les Français n’étaient pas les plus mal placés dans le domaine de la réussite en compétition dans les douze premières années 2000, à cheval sur les directions techniques Fauquet et Donzé. La recette a été égarée, mais peut-être pas perdue définitivement, et qui sait, les Richard MARTINEZ, Olivier NICOLAS, Stéphane LECAT, voire le service de recherche emmené par Philippe HELLARD, voire Patrick DELEAVAL, le service du haut-niveau et les entraîneurs nationaux entre autres, auraient des choses à dire à ce sujet…

Mais j’imagine qu’ils ne m’ont pas attendu et planchent à l’année sur le sujet.

MESSIEURS.- 1500 libre : 1. SUN Yang, Chine, 14’58s53 ; 2. Huy Hoang NGUYEN, Vietnam, 15’1s63; 3. JI Xinjie, Chine, 15’6s18; 4. Shogo TAKEDA, Japon, 15’17s13; 5. Ayatsugu HIRAI, Japon, 15’24s26; 6. Aflah Fadlan PRAWIRA, Indonésie,15’24s59

50 brasse : 1. Yasuhiro KOSEKI, Japon, 27s07 ; 2. YAN Zibei, Chine, 27s25 ; 3. Dmitry BALANDIN, Kazakhstan, 27s46; 4. SUN Jiajun, 27s65; 5. Vladislav MUSTAFIN, Ouzbékhistan, 27s72.

4 fois 100 4 nages: 1. CHINE, 3’29s99 (Xu Jiayu, 52s60, Yan Zibei, 58s86, Li Zuaho, 50s61, Yu Hexin, 47s92); 2. JAPON, 3’30s03 (Ryosuke Irie, 52s53,Yasuhiro Koseki, 58s45, Yuki Kobori, 51s06, Shinri Shioura, 47s99).

DAMES.- 50 libre : 1. Rikako IKEE, Japon, 24s53 ; 2.LIU Xiang, Chine, 24s60 ; 3. WU Qingfeng, Chine, 24s87.

400 libre : 1. WANG Jianjiahe, Chine, 4’3s18 [58s27, 2’0s06, 3’2s49] ; 2. LI Bingjie, Chine, 4’6s46 ; 3. Chihiro IGARASHI, Japon, 4’8s48 ; 4. Waka KOBORI, Japon, 4’11s69.

200 4 nages : 1. KIM Seoyeong, Corée, 2’8s34 [27s31, 59s37 (32s06), 1’37s60 (38s23) 2’8s34 (30s74)]; 2. Yui OHASHI, Japon, 2’8s88 [27s73, 1’0s78 (33s05), 1’38s04 (37s26), 2’8s88 (30s84)]; 3. Miho TERAMURA, Japon, 2’10s98; 4. ZHOU Min, Chine, 2’11s42; 5. YANG Chang, Chine, 2’13s68.

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About Braden Keith

Braden Keith

Braden Keith is the Editor-in-Chief and a co-founder/co-owner of SwimSwam.com. He first got his feet wet by building The Swimmers' Circle beginning in January 2010, and now comes to SwimSwam to use that experience and help build a new leader in the sport of swimming. Aside from his life on the InterWet, …

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