Championnats d’Europe 25m 2017
- 13-17 décembre, 2017
- Copenhague, Danemark
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Ancien nageur, Eric Lahmy est journaliste, écrivain, rédacteur en chef, et reporter. Il anime depuis 2013 Galaxie-Natation, un blog dédié à son sport préféré.
UN 100 METRES PLEIN LA VUE OU KROMOWIDJOJO A ENFIN PASSÉ SJÖSTRÖM
Depuis le début, il y a trois jours, des championnats d’Europe 2017 en petit bassin, qui se déroulent à Copenhague, on sentait que Sarah Sjöström, après son déluge de belles performances aux championnats du monde de Budapest et dans les meetings en petit bassin réunis sous le vocable de Coupe du monde, était un peu moins bien que d’habitude.
Fatigue bien naturelle pour la Suédoise, qui n’a pas dételé depuis plusieurs mois, et beaucoup voyagé entre l’extrême et le moyen orient où la coupe du monde dite Fina (comme dans finance) a posé ses quartiers d’automne et d’hiver. Elle a subi hier sur 100 mètres libre la loi de Ranomi Kromowidjojo. La Néerlandaise la pressait sérieusement ces dernières semaines, la menaçait sur toutes les distances où elles se rencontraient, leurs domaines d’excellence convergeant au point de se rejoindre depuis que Sjöström a abandonné ses ambitions sur 200 libre afin de se concentrer sur le sprint pur ou prolongé.
Les qualifications de cette épreuve avaient été marquées par de bonnes performances de… Charlotte Bonnet. La Niçoise, dans les séries, jeudi matin, avait nagé la distance en 52s19 dans la quatrième série, et seule Sjöström avait frôlé ce temps dans la sixième, avec 52s38. En demi-finales, Bonnet montait un peu plus en pression, et signait un 51s71 dans la deuxième demi-finale, nouveau record national petit bassin (pb) et meilleur temps de l’ensemble de la compétition.
Ce n’était plus seulement Bonnet, mais bel et bien Bonnet phrygien, qui agitait l’étendard de la révolte !
D’aucuns durent se demander si notre Charlotte nationale avait passé un palier de progression et n’était pas prête à s’attaquer aux monuments de la course. Et en effet, elle s’y attaqua, mais on ne peut pas dire qu’elle le fit victorieusement. En face d’elle, trois championnes olympiques ou du monde de sprint, Ranomi Kromowidjojo (50 et 100 mètres), Sarah Sjöström et la Danoise Pernilla Blume (50 mètres) faisaient bonne garde, qui lui barrèrent le chemin du podium.
Bonnet ne fut jamais réellement dans la course, ne serait-ce que parce qu’elle équilibre (très bien d’ailleurs) ses parcours et ne se distingue pas par des temps de passage mirobolants au 50.
Kromowidjojo, qui fut championne olympique à Londres sur 50 et qui montre plus que de beaux restes, se lança à vive allure et culbuta en 24s60 tout juste devant Sjöström, 24s63, et Blume, 24s70. Bonnet, en 25s01, était cinquième, un peu derrière Femke Heemskerk.
Pour le titre, le suspense dura jusqu’au bout et Kromowidjojo, 50s95, devança Sjöström, 51s03 tandis que Blume, décrochait et se retrouvait aux abords des plaques d’arrivée, presque rejointe, 51s63 contre 51s65, par la Niçoise. Ni le record du monde de Cate Campbell, 50s25, ni celui d’Europe, 50s58, de Sjöström, ne furent le moins du monde menacés.
PROGRÈS DE CHARLOTTE BONNET ET DE MARIE WATTEL
Il n’est pas interdit de penser que les performances de Bonnet représentent un progrès absolu, un changement de catégorie, et d’aucuns ne se gênent pas pour le clamer. 51s65 en petit bassin, pour elle, valent-ils mieux que son record en grand bassin, 53s65 (en mai dernier à Strasbourg) ?
Il n’est pas sûr que ses grandes rivales, celles qui l’ont précédée à Copenhague, aient pris autant au sérieux qu’elle ces européens en petit bassin. Au plan chronométrique, ses progrès, en cette période de l’année, sont certains, même si dans sa carrière, tout laisse croire qu’elle n’accordait pas jusqu’ici autant d’importance aux courses sur un champ d’eau de 25 mètres. C’est ainsi qu’elle n’avait pas nagé les mondiaux en petit bassin l’an passé à Windsor, au Canada.
La seule fois où elle semble avoir pris l’indoor au sérieux, c’est quand, en 2012, les championnats d’Europe se tinrent à Chartres. Il faut dire que les nageurs Français furent convoqués, si l’on ose dire, manu militari. Agnel, Muffat, Stravius, Manaudou y commirent quelques dégâts… Cette année, Bonnet finit 3e du 100 et 2e du 200 derrière Camille Muffat. Sur la distance reine, elle stoppa le chrono à 53s23. L’ironie est que, cinq ans plus tard, elle nage une seconde et demie plus vite et termine une place moins bien.
Et sur 200m ? Eh ! bien c’est aujourd’hui, le 16.
Bonnet n’était pas la seule Française en finale. Marie Wattel a elle aussi réussi un parcours intéressant. La grande Montpelliéraine de Loughborough prétend récemment qu’elle ne perdait plus ses moyens en compétition. Et elle l’a prouvé : avec 52s88 en séries (5e), 52s35 en demis (4e) et 52s25 en finale (6e) elle a passé un cap. Sur son physique, sa puissance athlétique, on lui a toujours prêté des moyens, la voici à vingt ans qui est en train de rejoindre ces joyeuses prédictions.
MYKHAYLO ROMANCHUK DÉGOMME GREG PALTRINIERI, KLIMENT KOLESNIKOV CASSE LA BARRAQUE ET VICTOR MOROZOV FRÔLE MANAUDOU
Sur 1500 mètres, le styliste ukrainien Mykhaylo Romanchuk s’est offert le scalp de Gregorio Paltrinieri à l’issue d’une démonstration d’égalité d’allure quasi horlogère, couvrant les trois 500 mètres de l’épreuve en 4’44s32, 4’44s97 et 4’45s30. Paltrinieri, deux semaines après avoir achevé un stage en Chine, avait pris le commandement des opérations, de sa nage courte et rythmée, tandis que Romanchuk s’évertuait avec lenteur et suivait dans ce style huilé où chaque mouvement semble prolongé, lui donnant une presque étrange impression d’aisance. L’Ukrainien, avec sa fausse lenteur rejoignit le frénétique Transalpin aux 500 mètres et se mit en devoir de le décoller. Les passages de Paltrinieri, 500 par 500, 4’44s41, puis 4’49s58 et 4’59s94, témoignent de l’effondrement physique dans lequel il se retrouva vers la mi-course. Il fut rejoint aux 1100 mètres par le Norvégien Henrik Christiansen, et il fallut que celui-ci ne soit guère bien plus fringant pour qu’il ne puisse le passer.
Les 14’14s59 de Romanchuk restaient à distance respectueuse des 14’8s06, record mondial de Paltrinieri, lequel héritait d’un modeste, pour lui, 14’22s93 ; Christiansen nageait 14’25s66 tandis que Damien Joly finissait 7e en 14’43s34.
Comme on pouvait s’y attendre après ses exploits sur 50 libre et 200 dos et son record du monde junior en 49s25 la veille en demi-finale, Kliment Kolesnikov gagna le 100 dos. Il lui fallut 48s99 (nouveau record mondial junior) pour rejoindre la plaque du mur d’arrivée, devant Simone Sabbioni, 49s68, et le Roumain Robert-Andrei Glinta, 49s99. Ce temps, c’est du très solide, car il n’a manqué à ce jeune homme de dix-sept ans que sept centièmes pour rejoindre le record du monde senior, 48s92 de Matthew Grevers.
Un autre Russe, Vladimir Morozov, frôlait pour sa part sur 50 mètres le record du monde de Florent Manaudou, vieux de trois ans, en 20s31 contre 20s28
Katinka Hosszu, après son 400 quatre nages et son 100 mètres dos, a remporté le 200 dos qu’elle a mené d’assez peu mais nettement, en 2’1s59 devant l’Ukrainienne Daryna Zevina, 2’2s27, qui sauvegardait pour sa part d’un rien son argent en face de la superbe Italienne Margherita Panziera, laquelle, en 2’2s43, améliorait son record p.b., 2’3s15. Hosszu avait l’air bien contente de l’emporter, tant Zevina l’avait constamment serrée.
L’heure de l’Allemagne arrivait : d’abord Philip Heintz ne donna guère l’impression de dominer d’entrée son sujet sur 200 quatre nages. Il virait 8e et dernier à l’issue du papillon (25s), était 7e après le dos (53s93), remontait à la 4e place à l’issue de son parcours en brasse (1’25s96) et dégommait trois nageurs de plus dans son parcours de crawl en 26s45 pour dominer : 1’52s41.
A peine Heintz s’était-il séché que sa compatriote et presque homonyme Franziska Hentke gagnait le 200 papillon, qui devançait l’Italienne Ilaria Bianchi et Lara Grangeon. La Française, décidément, réalise un parcours intéressant à Copenhague, qui enlevait du bronze, après l’argent du 400 quatre nages. Lara, qui a montré aussi quelques dispositions pour la longue distance, a décidé, me dit-on, de rejoindre désormais le groupe d’entraînement des marathoniens de Philippe Lucas…
Sur 100 quatre nages, Katinka Hosszu, 56s97, a devancé Sarah Sjöström, 57s92, tandis que la Norvégienne Susann Bjoernssen, 59s26, a devancé la jeune Néerlandaise Marrit Steenbergen, 18 ans le 11 janvier prochain, 59s35.